Le Winamax Poker Tour prendra-t-il encore cette année la forme d'un grand "Tour de France du poker" ? Rien n'est moins sûr à la lumière d'une décision de justice passée inaperçue avant l'été, mais dont les motivations impacteront nécessairement les modalités de la compétition. L'organisation d'étapes live en dehors des cercles ou des casinos est remise en cause.

D'ordinaire, les qualifications pour les étapes live du Winamax Poker Tour débutent dès la fin du mois d'août. Donner le coup d'envoi de la compétition avant l'automne est une vraie nécessité au regard de la densité de son calendrier. D'octobre à janvier, de La Villette à Marseille en passant par Lille ou Nancy, le "Tour de France du poker" ne s'accorde aucun week-end de répit et visite des dizaines de villes. Ces rendez-vous populaires et conviviaux constituent d'ailleurs, depuis la toute première édition, la pierre angulaire de l'épreuve.
Et pourtant, cette mécanique parfaitement rôdée pourrait bien ne pas se remettre en branle cette année. Car si Winamax n'entend pas ranger au placard son événement emblématique (l'édition 2018-2019 devrait être annoncée la semaine prochaine), une décision de justice — restée sous le radar des médias spécialisés durant l'été — semble sonner le glas de la grande fête de La Villette ainsi que des rendez-vous en province. Retour sur un feuilleton judiciaire lourd de conséquences.
Casinos de France vs Winamax : origines d'un litige

Dès 2016, plusieurs groupements de casinotiers formulent à voix haute des interrogations sur les conditions d'organisation du Winamax Poker Tour. Cette initiative collective auprès du Service Central des Courses et Jeux et l'ARJEL mobilise notamment le Syndicat des Casinos Modernes de France, le Syndicat Casinos de France, l'Association des Casinos Indépendants Français et la société des Forges Thermales. Tous s'émeuvent de concert de la concurrence supposée déloyale que génère la compétition de Winamax, à leurs yeux organisée en dehors des clous réglementaires.
Dans les semaines qui précèdent la convergence de plus de 2 000 passionnés à La Villette, en octobre 2017, ces mêmes casinotiers tentent de faire annuler l'événement. Leur démarche se matérialise ainsi par une procédure en référé devant le tribunal de commerce de Paris. Mais par une ordonnance en date du 11 octobre 2017, le président de la juridiction ne fait pas droit à leur requête. L'événement se déroule donc comme prévu, ce qui n'entame toutefois pas leur détermination : par une déclaration datée du 8 novembre 2017, ils interjettent appel de cette ordonnance. Leurs arguments sont simples :
- les deux agréments dont dispose Winamax l'autorisent à proposer du poker et des paris sportifs en ligne, mais en aucune façon à organiser des tournois de poker en salles ;
- les étapes du Winamax Poker Tour s'apparentent à la tenue illicite d'une maison de jeux de hasard ;
- cette violation de la réglementation en vigueur leur occasionne un préjudice.
En préambule, la cour d'appel de Paris rappelle que l'exploitation non autorisée de jeux de hasard porte effectivement une atteinte directe aux intérêts économiques et moraux des casinos et des cercles. Pour être interdites, les "loteries" doivent cependant réunir quatre caractéristiques : l'offre au public, l'espérance d'un gain, l'intervention du hasard et l'exigence d'une participation financière par l'organisateur.
Dans le cas présent, l'espérance d'un gain (une finale dotée de 500 000 € garantis) et l'intervention du hasard ne font pas vraiment débat. Demeurent donc les questions de l'éventuelle participation financière exigée et de l'offre au public :
- La gratuité de la compétition a toujours été mise en avant par Winamax. Le site de l'opérateur souligne ainsi que "l'ensemble du processus de qualification à la Grande Finale du Winamax Poker Tour, depuis les Sit & Go en ligne jusqu'aux étapes live, [est] accessible à tous sans qu'il ne soit nécessaire de débourser un centime". Néanmoins, la cour d'appel constate que l'accès à ces qualifications est subordonné à l'utilisation de tickets Starting Block dont certains sont distribués gratuitement, mais dont d'autres requièrent une activité de jeu en argent réel. Une mécanique qui aux yeux de la justice est assimilable à un sacrifice financier.
- Si l'accès aux étapes live est réservé aux joueurs qualifiés sur Winamax, toute personne est libre de prendre part à ce processus de qualification. Cet élément, couplé à la "publicité importante" entourant le Winamax Poker Tour, suffit à emporter la conviction du juge sur la notion d'offre au public. La conclusion est implacable : "Il en résulte l'existence effective d'une offre publique d'accès à une maison de jeux de hasard par la société Winamax en violation et au préjudice du monopole attribué par le code de la sécurité intérieure aux casinos et cercles de jeux".
Daté du 23 mai dernier, ce jugement est intervenu trop tard pour conduire à l'annulation de la dernière édition du Winamax Poker Tour. L'assimilation de la compétition à un "trouble manifestement illicite" fait en revanche planer une épée de Damoclès au-dessus des prochaines éditions de l'épreuve, qui de toute évidence ne s'appuiera plus à l'avenir sur les mêmes modalités. La grande finale dans l'enceinte d'un cercle de jeux survivra-t-elle ? Une chose est sûre en l'état : ce ne sera pas le cas des autres rendez-vous live...
C'est du pénal. EDIT: en fait non mais c'est tout comme.
L'imposition du poker est du ressort du droit administratif.
Les deux peuvent affirmer des choses contraires selon ce qui arrange l'État.
GG us
Edited by manubShare this post
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