Un an après ses débuts remarqués sur Netflix, l'émission sud-coréenne À l'Épreuve du Diable (VO : The Devil's Plan) revient pour une deuxième saison qui force toujours le spectateur à se creuser les méninges. Dans ses épisodes 6 et 7, toute la dramaturgie du programme est concentrée dans une partie éliminatoire de Sniper Hold'em, une déclinaison du poker qui autorise les participants à éliminer des combinaisons qu'ils jugent probables dans les mains de leurs adversaires.

Des esprits vifs réunis autour d'épreuves de réflexion ou de stratégie : c'est en ces termes que nous résumions l'an dernier la philosophie de l'émission À l'Épreuve du Diable. Nous mettions à l'époque en avant des moyens de production hors norme, la qualité du casting et surtout la créativité des épreuves proposées lors de chaque épisode. Une recette que ne renie pas la seconde saison distillée au compte-gouttes par Netflix depuis deux semaines.
Côté casting, le spectateur occidental retient de prime abord la présence de Lee Sedol, remarquable champion de go qui avait rendu son tablier quelques années après sa défaite historique face au programme Alphago de Google DeepMind. Puis au fil des épisodes, d'autres personnalités émergent au gré des alliances et des trésors d'ingéniosité déployés face à certains casse-têtes.
Car c'est bien là tout le sel de The Devil's Plan : les épreuves sont parfaitement dosées et de toute évidence, elles ont fait l'objet de tests minutieux pour s'assurer de leur caractère télégénique autant que de leur capacité à pousser les candidats dans leurs retranchements. Le Loup Garou a de nouveau droit à une version revisitée, tandis que le jeu du cavalier se taille une place importante dans les premiers épisodes. Puis vient le tour d'une déclinaison du poker qui, contrairement au mémorable Equation Hi-Lo de la première saison, n'est pas réservée à la finale mais apparait dès les épisodes 6 et 7 diffusés cette semaine.
Les règles de cette variante baptisée Sniper Hold'em ? Chaque participant se voit attribuer 60 jetons, avec l'objectif assigné de faire fructifier ce tapis jusqu'à 75 unités pour assurer sa survie et quitter la table. Au début de chaque coup, deux cartes privatives sont attribuées à chacun. Celles-ci émanent d'un jeu de 40 cartes qui sont toutes comprises entre 1 et 10, et ce sans la moindre distinction de couleur. Les combinaisons susceptibles d'être réalisées sont donc les mêmes qu'à une table de poker, à l'exception de la couleur et de la quinte flush qui sont ici sans objet et disparaissent de la hiérarchie traditionnelle.
Les tours d'enchères se déroulent eux aussi dans les mêmes conditions que lors d'une partie de hold'em, si ce n'est que le dévoilement du board se décompose ici en deux étapes seulement : deux cartes communes, puis deux autres révélées simultanément. Ce n'est qu'après le dernier tour d'enchères qu'intervient la vraie particularité de ce Sniper Hold'em : chacun leur tour, les joueurs encore en lice ont la possibilité de nommer précisément une combinaison (un full aux 10, une quinte à l'as...) qui ne sera pas prise en compte si d'aventure elle apparait dans la main d'un adversaire. Au showdown, les mains qui auraient ainsi été désignées à bon escient sont dites snipées : elles disparaissent purement et simplement de l'équation.

Alors bien sûr, n'allez pas voir dans cette mécanique la prochaine variante en vogue qui prendra la communauté poker par surprise et partira à la conquête des casinos du monde entier. L'intérêt de la manœuvre n'est de toute façon pas là. Comme pour les autres jeux soumis aux candidats de À l'Épreuve du Diable, c'est la dynamique créée par ces territoires vierges de toute réflexion théorique qui rend le visionnage passionnant.
Avec le Sniper Hold'em, comme avec le Equation Hi-Lo avant lui, les participants sont contraints de dénouer eux-mêmes et à brûle-pourpoint les aspects stratégiques du jeu. Faute d'un Super System ou d'une trilogie Harrington de la variante, leurs réflexions s'emmêlent et se démêlent en direct, avec les erreurs et découvertes que cela implique pour eux-mêmes comme pour le spectateur. Ce dernier se prend au jeu et constate parfois avec surprise qu'il aurait bien sa place à la table. Un peu comme une fenêtre temporelle qui s'ouvrirait sur cette époque bénie, mais pas si ancienne, où la lecture de Poker Cadillac suffisait à vous placer bien au-dessus de la mêlée.

Une téléréalité d'enfermement qui réunit des candidats intelligents, c'est déjà prometteur. Mais quand les jeux imaginés par les producteurs pour les départager sont à la hauteur à la fois en terme de divertissement et de créativité, la réussite est totale. À découvrir sur Netflix sous le titre À l'épreuve du diable, avec en point d'orgue des épisodes 10 et 11 consacrés à une partie de poker d'un genre nouveau.
[...] Lire la suite…
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